éditions
du Groupe de L'Ours
autour du lettrisme, des situationistes, de l'Oulipo et la pataphysique
Se dire lettriste toujours, parce que ça fait hurler les chiens.
Des millions d'oiseaux bleus[3]
1973 Antoine Grimaud
Je suis hanté
1973 Antoine Grimaud
Il
est difficile parfois de se souvenir précisément du passé. Plongé dans mes caisses
darchives, je ressors des documents, dont certains ne mévoquent que peu de
souvenirs. Ils sont pourtant là, et cest moi qui les y ait mis, il y a longtemps
déjà.
Il en est ainsi dun tract à propos dun « Branle-Bas »
le 30/01 à la faculté de Censier.
Nous intervenions souvent à Censier, mais là ? rien ne me revient.
Le branle-bas dont je me souviens, et qui nous secouera durablement, a dans mon souvenir
lieu lannée suivante, et jen parlerai plus tard. Toujours est-il quil
existe deux textes recto-verso sur un tract « A propos du branle-bas du
30 janvier 1973 à la faculté de Censier. Ce que nous voulons : »
signé Isidore Isou et « Ce que veulent les cloportes de
Censier . », signé « Le comité de vérification de
Censier ».
Jen conclus que nous avions mené une action, ,et que nous navions pas gagné.
[
J'ai gardé plusieurs versions du tirage de ce tract, de divers formats (21 sur 27
ou 29,7) et de diverses couleurs. A l'époque je participais au tirage de ces tracts,
généralement sur la Ronéo de Jean-Paul Curtay mais je ne me souviens plus pourquoi il y
avait ainsi ces mélanges de papiers ? Peut-être distribués à diverses occasions, ou
tout simplement utilisation des stocks existants ? ]
EnMars Avril :
du 19 mars au 14 avril se tient une grande exposition du groupe, « La Lettre et le Signe », pour
laquelle nous faisons, Jacqueline Tarkieltaub et moi-même
laffiche-invitation. Je pense que cest Maurice Lemaître qui était
en relation avec Joane, le propriétaire de La Guilde, librairie-galerie
de la rue Quincampoix, chez qui dautres expositions auront lieu au fil du
temps. Cest dans cette rue que quelques années avant et encore à
lépoque me semble-t-il Marcel Dadi donnait ses cours de guitare.
Hypergraphie
1973 Antoine Grimaud
Hypergraphie
1973 Antoine Grimaud
L'oiseau rare
1973 Antoine Grimaud
L'arche de Noé
1973 Antoine Grimaud
élémentaire mon cher Watson
1973 Antoine Grimaud
En plus de
quelques tableaux et dessins, j'exposais là "Le
Mariage", roman hypergraphique dont il me reste ces 4 photos de
faible qualités.
[ Collage et encre, format raisin, 4 pages ]
Le Mariage 1
1973 Antoine Grimaud
Le Mariage 2
1973 Antoine Grimaud
Le Mariage 3
1973 Antoine Grimaud
Le Mariage 4
1973 Antoine Grimaud
En Mai nous distribuons avec Maurice lemaître un tract imprimé (et non ronéoté come
il était souvent d'usage)
"Un individu équivoque : François Mathey à propos de son exposition
Equivoques au musée des Arts décoratifs"
Ce tract est indiqué comme ayant été publié le 7 mai 1973 par diverses revues dont Documents
Lettristes, dont le premier numéro devait être prévu pour cette époque là. J'ai
d'ailleurs un texte dactylographié, destiné à la couverture de cette revue, et daté du
13 mai.
Depuis 1972 et son exposition très controversée, (Douze
ans d'art contemporain en France,
Grand Palais, mai-septembre 1972), Mathey était souvent la cible de nos attaques.
En Mai
encore,
nous publions l'Histoire du Roman depuis les
origines jusquà lhypergraphie, texte dIsidore Isou dans le
numéro 30 de CRL [Bulletin du centre de la recherche lettriste], revue fondée
par Roberto Altmann, Jacques Spacagna et Roland Sabatier.
Comment me suis-je retrouvé co-directeur de ce numéro avec Jean-Paul Curtay ?
Nous avions lintention de publier cette histoire du roman et je métais
chargé décrire la partie sur le roman grec et latin. Grâce à RolandSabatier
qui mavait fait une lettre de commande dun ouvrageau nom des éditions Georges Visat,
javais pu obtenir une carte à la BN, et je me souviens avec plaisir de ces longues
heures de lecture, plongé dans lâne dor dApulée ou le Satiricon.
Des grecs je ne retrouve quune fiche avec deux titres « Chéréas et
Callirhoé » et « Leucippé et Clitophon ». Les ai-je lus
alors ? Où nétait-ce que pour la beauté des phonèmes ? Jy
retrouve, mais pourtant elle fut publiée un an avant, les sonorités de « Clitorème
et Médalété » ma première revue, dont une des caractéristiques était que
tous les numéros devaient avoir des formats différents. Je me souviens que Satié
mexpliqua pourquoi cétait une idée idiote, aucun collectionneur ne
sembarquant dans ce genre daventure. Il est vrai que je ne fis pas fortune.
Isidore Isou, Antoine Grimaud et Jean-Paul Curtay Histoire du
roman CRL
En
Juin : Nous partons à quelques uns à Bruxelles,
pour assister au vernissage de lexposition qui se tient à la galerie Espace
2000. Il y a Jean-Pierre Gillard, François Poyet, Florence
Villers et moi même. Je suis étonné aujourdhui de ne pas revoir Gérard
Philippe Broutin parmi nous, et je ne comprends pas pourquoi il naurait pas
été là, mais le fait est que je ne me souviens que des trois autres.
[ EN 2008, Gérard contacté répond qu'il ne se souvient plus non plus s'il
y était et écrit drôlement "Zéro au test mémoire".
Si on est deux à ne pas se souvenir, peut-être n'y était-il pas ? ]
1973 Antoine
Grimaud Organigramme hypergraphique
La
galerie est magnifique, lexposition splendide, nous sommes très chaleureusement
reçus par le propriétaire qui a payé notre voyage et nous loge bref nous sommes
ravis. Jexpose une très grande toile [120 fig.], et cette toile est
achetée au prix fantastique de 3 000 francs par un amateur quon me présente comme
un monsieur Perdriel, de la famille du Nouvel Observateur. A
lépoque, javais calculé que je vivais bien si jarrivais à trouver 300
francs par mois et cette vente énorme mavait littéralement dopé. Dans les jours
qui suivirent javais intégralement dépensé la somme par avance, qui bien sûr ne
fut jamais payée, mais je pus cependant récupérer la toile. Cette « vente »
est toujours restée ma meilleure vente, celle dont je me souviens avec le plus de
plaisir, tant fut forte la joieressentie ce
soir là, pendant quelques heures.
Il était prévu que nous ferions, à quatre une uvre en public, ce
qui ne correspondait pas du tout à notre façon habituelle de travailler, mais beaucoup
à la mode de lépoque portée sur les « performances » et, bien aidés
par lalcool, nous commencions notre uvre commune dans la joie et
lenthousiasme. Le public était venu nombreux, des gens chics, bien habillés, des
femmes en robes de soirée, des types à tête dhomme daffaires, rien de ce à
quoi nous étions habitués. Vraiment la Belgique savérait un paradis, car tous ces
gens semblaient prendre intérêt à nous. A grands gestes, avec ou sans élan, par
touches et griffures successives, luvre avançait. Je me souviens quand même
davoir été assez inquiet du résultat : ce nétait ni très beau ni
très créatif, mais cela semblait intéresser notre public. Jean-Pierre qui
avait la main secoua fortement son stylo qui semblait manquer dencre et nous vîmes,
à quelques mètres de là, la longue robe claire dune dame respectable se couvrir
dune traînée à la Pollock, tout à fait spectaculaire. Il semble que nul
ne le remarqua, et à la fin, nous ne signâmes pas la robe. Il fallut dédicacer quelques
ouvrages aussi, de beaux livres que nous grabouillions un peu, dans des improvisations
aléatoires !
Le lendemain, toujours un peu grisés, certaines cartes didentité furent
abandonnés aux douaniers, le chauffeur ayant repris la route un peu tôt, sans que le
contrôle ne fut fini. Je ne me souviens pas comment ces papiers furent récupérés, ni
sils le furent dailleurs ?
Grande
Hypergraphie
1973 Antoine Grimaud
Projets de logo pour notre
hôte
par Jean-Pierre Gillard
Cest
en mars, avant une réunion de groupe, que
jai vu mon premier film situationiste « La
dialectique peut-elle casser des briques » de René Viennet,
qui ma beaucoup réjoui et bien fait rire souvent, tant le choc des images et des
discours était roboratif. Je pense quà lépoque je navais pas encore
vu « Le traité de bave et déternité »
dIsou qui me bouleverse encore aujourdhui, et ce nest que plus
tard que je verrai la plupart des films de Debord, dont le somptueux « In girum imus nocte et consumimur igni ».
C'est Francis Deron,
[pas encore en prison sous Mao, ni correspondant de presse en chine], qui
m'avait indiqué, bien avant sa sortie, ce film de Viennet avec qui il travaillait
régulièrement . Ma fréquentation du "vieil Isidore" amusait fort mon vieux
copain.
L'anné suivante, il participera à la publication du fameux "Révo cul dans
la chine pop"
Le
soir même je compris quil nétait pas lettristiquement correct de
samuser à ce film, et nous sortîmes bientôt un tract virulent (5
pages format 21 x 27), sur lequel on trouve mon nom bien évidemment. Je
ne me souviens pas davoir participé au lancer de ce tract, mais généralement ces
opérations se faisaient à un ou deux seulement. Il est surprenant, le nombre de
tracts que nous lancions dans Paris, atteints dune graphomanie importante et
compulsive.
La règle du groupe était que le responsable dune action pouvait utiliser la
signature de tous les membres du groupe, quitte à être attaqué après coup, [ en
respectant un délai d'un mois après la fin de l'action ] et donc ces tracts
nétaient généralement pas discutés avant leur lancement.
Mais il est surprenant aussi pour moi aujourdhui que je nai pas été
dérangé par cette prose le plus souvent lourde et indigeste, avec les mots importants
soulignés, souvent rabâchés dun texte à lautre, et je ne crois pas avoir
jamais éprouvé le besoin de les discuter alors. Ce nest que des années après que
je demanderai que mon nom ne paraisse plus sur un texte que je naurais pas validé
explicitement, et que de fait il ne parut plus.
En 1973 je me coupais parfaitement bien en deux, prenant un grand plaisir au film
« détourné » et approuvant certainement le tract incendiaire lancé contre
lui ( ?) ou au moins n'y attachant pas d'importance.
en
plus des 20 signataires habituels, membres du groupe cette année là, on trouve les noms
de François Legrand, Yves Logut, Serge Luscin, Catherine Martin, Jacques Mestre, Philippe
Mantaneçay, Annie Mouquet, France Muttin, Jeanne Nollot, Didier Pernet, Danièle Petit,
Christian Pigeot, Bernard Prunier, Renè Regnier, Jean Rosny, Nicole Toutan, Louis Violet,
Marcel Voisin, "Pour les comités de vigilance des écoles, des lycées et des
universités"
Il était courant à l'époque de chosir des noms au hasard dans l'annuaire, pour faire
nombre.
En
Juin / Juillet : du 15 juin au 20 juillet,
se tient une magnifique exposition à la Galerie Suzanne Visat, « La Vérité Lettriste » qui
présente les 22 membres du groupe de lépoque, plus Pomerand. Les morts
sont gens très fréquentables ! Spacagna nest plus là, qui a quitté
le groupe en 1972, et qui reste certainement lun des plus grands peintres lettristes
qui soit, des plus créatifs, auteur de toiles magnifiques et diseur de génie quand il
récitait ses poèmes. Alain Latour y est aussi, mort depuis, et dont jai
le bonheur de posséder quelques livres originaux quil ma offert. Ce
nétait pas un comportement si courant, dans le groupe, doffrir ses
uvres et, si jaime beaucoup sa peinture, jaimais aussi lhomme, sa
modestie et sa gentillesse.
Quand je revois cette invitation, je retrouve toute lamitié qui me liait à
beaucoup des exposants : Florence Villers partage toujours ma vie, Sylvie
Fauconnier et Pierre Jouvet sont deux amis très chers, Les
trente-cinq dernières années mont séparé des autres mais jespère souvent
en revoir certains, au hasard dune rencontre. Peu finalement me sont devenus
antipathiques, malgré des divergences fortes et violentes qui apparaîtront quelques
années plus tard.
Le groupe
1973 Antoine Grimaud
Antoine Grimaud, Galerie Suzanne Visat
Antoine Grimaud
Sylvie Fauconnier
et
Florence Villers
Avec Sylvie Fauconnier
en robe "Broutin"
Avec Patrick Poulain
2 ouvrages d'Alain Latour, format quart de page, couverture métallique
En
Août nous participons au Festival dEdimbourg. Je ne me
souviens plus qui javais rencontré, à la demande de Roland Sabatier, pour
défendre la participation du groupeà ce
festival, mais la rencontre avait été fructueuse puisque je me suis retrouvé
« responsable » de la participation française à la section cinéma. Nous
sommes partis à quatre, Pierre Jouvet, Mona Fillières, Anna
Gauffre et moi même, dans la fameuse 4L « hypergraphiée » de « Lautre »,
le coffre empli de tous les films et documents que nous avions réuni. Il faudra
peut-être un jour raconter ces quelques jours en écosse, mouvementés et profitables. Je
me souviens des discussions assez violentes avec le responsable de notre invitation qui
savéra une espèce de faussaire ou descroc, nullement habilité à signer au
nom du festival les papiers qui nous garantissaient argent, logis et couverts ! Tout
cela fut trouvé, mais difficilement. Et une salle aussi nous fut attribuée pour
plusieurs jours de présentation. Qui na pas assistéà une séance de cinéma lettriste aura des difficultés à comprendre
lénergie quil fallait déployer pour que se projette le film à couleur
indépendante de la pellicule ; celui dont la bande son devait se faire (bruitage et
explosions comprises) en direct depuis la salle ; ceux dont la pellicule trop
ciselées se brisait ou prenait feu, trop chargée en peinture qui encrassait les
appareils de projection. Sans compter la commission de censure qui nous obligea à
déposer un panneau X sur la porte de la salle, chaque fois quun film passait, dont
la bande son leur avait paru trop suggestive.
A ce même festival, des années après, regardant plus en détail le programme, je
maperçus que John Lenon était présent également. Je navais pas eu
le temps de mintéresser aux autres participants, et je ne crois pas non plus
quil soit venu assister à nos projections.
Mona Filières
C'est en juillet
que paraît chez Filipachi un très beau numéro des Grands Musées,
consacré à la méca-esthétique. Isou m'ayant demandé une oeuvre, je lui portais A.U. un petit 0 figure,
lors d'une de nos réunions du jeudi. Il estima ne pas pouvoir la publier et me demanda
une autre proposition, ce que je ne voulus pas faire.
Ne souhaitant pas que je sois exclu de cet ouvrage il me "donna" alors deux de
ses oeuvres et demanda à Alain Satié de les photographier. Je les découvris
en lisant la revue à sa publication et je pensais alors que le chapeau devait être
à l'envers.
Isou l'année précédente n'avait pas aimé que je signe mes premières toiles d'un
simple G.
Moi je trouvais que pour un lettriste ....
Dans ces 2 cas je constate que, pour autant que je m'en souvienne, cela
n'avait pas beaucoup d'importance pour moi à l'époque, et que cette "censure"
d'Isou, sur son bouquin, ne me génait finalement pas.
Et l'idée d'être dans un bouquin prestigieux pour une oeuvre que je n'avais pas
faite m'amusait aussi, sans doute.
En
Octobre : Le Centre
International de Séjour organise une exposition dun mois
intitulée « Photo-écritures lettristes »
et dans ce cadre, le 27/9 Il y a une grande
soirée de Poésie, Cinéma, Chorégraphie etc dont je suis responsable.
Que dire ? Que ce fut un grand succès, une soirée brillante et drôle, que le
public vint nombreux ? La vérité est que je ne men souviens plus du tout
aujourdhui, peut-être un jour, au hasard de louverture dune caisse,
retrouverais-je des éléments qui me rafraîchiront la mémoire, je complèterai alors
ces souvenirs. Lexposition elle-même était sous la responsabilité de Florence
Villers et présentait un ensemble de plus de 100 uvres réparties en
quatre sections distinctes et devait, dans notre esprit, se poursuivre par une grande
tournée européenne, qui, si mes souvenirs sont bons, neut jamais lieu.
Antoine Grimaud et Jean-Pierre Gillard
lors de la soirée du CISP
Antoine Grimaud
Gérard-Philippe Broutin
Jean-Pierre Gillard
au Centre International de Séjour de Paris
Perversion un soir d'été
1973 Antoine Grimaud
Je
me souviens un peu mieux de notre participation au salon « Art
Sacré, Expression Spirituelle » organisée par Janine
( ?) Pichard, une charmante vieille dame dans mon souvenir, qui nous
accueillit avec beaucoup de gentillesse. De façon assez drôle la toile que je
présentais faillit être censurée ! Larchevêque de Paris devait inaugurer
lexposition et des membres du comité avaient craint que le titre choisi, « Les Déesses sont parmi nous »,
pour un portrait de Florence Villers, ne heurte sa sensibilité. Jaurais
assez aimé cette censure tant la sottise peut être réjouissante, mais même eux durent
admettre quil ny avait pas de quoi fouetter un chat, et Jeanine Pichard
les convainquit de ne pas déplacer ma toile vers quelque coin obscur.
Le vrai comique de cet incident ne mapparut que quelques mois plus tard quand
on reparla, lors de sa mort « dans lepectase de lapôtre »
selon le fameux communiqué de léglise, du Cardinal Danielou,
dont ses ouailles craignaient que je noffensasse la pudeur ! Je nétais
dailleurs pas au vernissage : si notre hôtesse était charmante, son comité
était vraiment trop un ramassis de vieux cons pour poursuivre des relations une fois
laccrochage fait.
Les déesses sont parmi nous
1973 Antoine Grimaud
Hypergraphie
1973 Antoine Grimaud
" Even more courageaous, she [Janie Pichard] has
hung, right at the entrance, works by a cheerfully irreverent group of Lettristes, most of
them under 25, just back from succesful group-shows in Germany and italy. They have
pinned up their controversial manifesto, written by their founder Isidore Isou. This is
not anti-religious but is decidedly anti-clerical in the tradition of Shelley and victor
Hugo. Janie Pichard refuses to take it down : "Voyons ; this is Paris not Moscow ;
I'll have no censorship here." " Susan Glyn, in The Tablet, 27 october 1973
Nous
étions beaucoup plus intéressés par linvitation de Maurice Fleuret à
participer, dans le cadre des « Journées de
Musique contemporaine », à un concert le 18
octobre, au Musée dart moderne de la ville de Paris, où
un grand nombre duvres furent données, devant un public que javais
rarement vu si nombreux !
Grâce à Fleuret, lensemble vocal Alborada interpréta un grand
nombre duvres. Pour ma part je leur confiais quelques textes, les laissant
travailler, sans autre indication. Et ce fut un moment fort plaisant que dentendre,
dit par dautres et correspondant bien à ce que javais souhaité, ce que
javais écrit : javais la preuve que le simple agencement des phonèmes
était suffisant pour guider linterprète attentif.
Puis il y eut la soirée du 18 octobre, dans l'église Séverin, et l'happening
musical sur le thème de Bach.
Ce fut une soirée mémorable, dont je garde des souvenirs joyeux et drôles. Ce fut aussi
l'occasion de nous fâcher avec Maurice Fleuret qui ne nous pardonna pas de ne
pas avoir respecté le contrat accepté. Mais comment pouvait-il croire que nous le
respecterions ?
Il y avait là plusieurs chorales, orchestres, groupes, répartis dans l'église et chacun
devait jouer sa partition, dans un lent crescendo, et rester dans l'espace qui lui était
imparti. Le spectateur lui se déplaçait entre ces masses sonores, et faisait tout seul
sa "balance" et son "mixage".
Que pouvions-nous, avec nos voix, face à l'orgue dans sa puissance ?
Nous
débutâmes donc très violemment et rapidement, quittant notre emplacement, nous nous
égaillâmes, intervenant dans chaque chorale, orchestre, créant un remue-ménage
certain. Tous ne furent pas totalement hostiles à notre démarche.
Je me souviens que Daniel Humair était là, en trio
avec Guy Pedersen et Raymond
Guiot [ Nous connaissions bien Humair et un peu Pedersen,
mais je crois avoir écouté Guiot pour la première fois ce soir là ]
et qu'avec Jean-Pierre Gillard nous sommes "entrés" sur l'un de leur
morceau, pour une très brève intervention. Leurs premiers regards furent de colère
puis, peut-être amadoués par la brièveté de notre interruption, ils nous firent signe
de revenir quelques minutes après, pour une improvisation commune dont je leur suis,
aujourd'hui encore, fort reconnaissant. Fleuret ne nous pardonna jamais, je le regrette, c'était un homme de bien.
Externe, interprété par
Antoine Grimaud (on reconnait Curtay et Broutin)
et une oeuvre de Jean-Pierre Gillard [Disparition
du Psy (?)] par Jacqueline Tarkieltaub, François Poyet, Sylvie Fauconnier,
Antoine Grimaud et Anne-Catherine Caron
Le 23 novembre, nous participons à
lassemblée générale de la Jeune Peinture, au café Le
Tambour, place de la Bastille. Classiques engueulades entre les divers groupes etfactions, sans doute que Rédélé était
présent au nom du FHAR [Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire],
Fromanger aussi, Maurice Rapin et Mirabelle Dors bien sûr, les
ineffables trotskistes, Nesterenko et deux autres aussi dont je revois la tête
mais dont les noms méchappent maintenant. Il était question de participer à un Front
Culturel avec les Cahiers du Cinéma et le Front des Artistes
Plasticiens, dans lequel nous étions déjà représentés. Là aussi un vague
souvenir dune participation à une assemblée générale où nous avions pour but de
faire élire Florence Villers à la présidence de lA.G. Elle fut élue
dailleurs, mais était-ce ce jour là ? Et pourquoi faire ? Etait-ce ce
soir là aussi, que pour contrer Isou qui avait tendanceà sengager dans des discours jugés fort
longs par lassistance, fut votée une motion limitant le temps de parole à 2 ou 3
minutes par intervenant. Isou sy plia sans peine, ne prenant la parole que
pour prononcer une phrase ou deux - parfaitement pertinentes et efficaces - mais la
prenant sans cesse, presque entre chaque autre intervenant, au grand dam de nos
adversaires, essentiellement les trotskistes de lOCI !
ce tract, non signé mais facilement identifiable, fait allusion à une réunion tenue le
7 décembre 1973.(?)
Il s'agissait certainement de fédérer les divers participants autour de positions
minimales communes.
En novembre
encore a lieu une exposition dans la galerie de Lucien Desalmand, alors
située dans le XV°. Je m'occupe de l'organisation de cette exposition et travaille dans
la galerie pendant toute sa durée. Roland Sabatier avait fait l'invitation et l'affiche
et une de mes grandes toiles [150 x 150] occupait toute la vitrine. Tous les autres
membres du groupe avaient donné des gravures et des dessins, non exposés sur les murs,
mais présentés à la demande.
Antoine Grimaud avec Lucien Desalmand
autour d'Aline Huchon,
Antoine grimaud, Florence Villers, Jean-Paul Curtay
Janie vand Den Driessche, Florence Villers, Patrick Poulain
Grande Hypergraphie
1973 Antoine Grimaud
Documents Lettristes : Javais un projet
dune revue qui garderait la mémoire des tracts lettristes en les rassemblant tous
sous une même couverture. Rapidement lidée vint den faire une revue
super-temporelle, éternellement destinée à intégrer, classer et protéger les
publications, au fur et à mesure de leur apparition.Cette revue fut entièrement financée par Maurice Lemaître, qui
moffrait le tirage de la couverture chez son imprimeur personnel. Jen avais
fait la couverture avec lui, et rédigés quelques textes de présentation, toujours avec
ses conseils, son avis. Puis il se passa quelque chose, que jai oublié, mais
peut-être lui sen souviendra et lécrira un jour. Toujours est-il
quIsou jugea quil mavait causé du tort et le sanctionna en lui
interdisant de marquer, de quelques façons que ce soit, son nom ou même ses initiales ou
un signe quelconque qui aurait attesté dune présence/absence. [ Cela avait
été fait dans un numéro fameux d'UR du 30 décembre 1950 ou Jean-Louis
Brau n'apparaît que sous ses initiales, en représailles de la perte d'un manuscrit
d'Isou sur la peinture, l'excuse de la consommation de mandarin curaçao et de
kif n'ayant pas été retenue. ]
Mais Maurice aurait bien mérité davoir son nom sur cette revue, il fut
mon mécène et réellement, co-fondateur de ces « Documents Lettristes » qui,
dans mon souvenir, parurent dans le premier semestre 1973.
Peut-être puis-je profiter de ses souvenirs pour parler un peu de mes relations avec Maurice,
homme généreux, ouvert, sympathique et attentionné. Il ma beaucoup aidé,
ma aidé à vivre dans des moments difficiles, ma donné de largent au
prétexte de faire de moi un secrétaire dont il navait nul besoin, ma invité
à boire du thé accompagné de bons gâteaux chez sa mère, ma montré son atelier
et même proposé dy travailler, ma fait écrire des articles pour diverses
revues, bref sest montré fort aimable, et je laimais, et garde une immense
tendresse pour lui. Et puis Maurice cest aussi quelquun qui vous
bouffe, exigeant, avide, poussé par une passion qui ne respecte personne, capable de vous
faire les pires emmerdements pour des prétextes que je ne comprenais pas, et qui peut
devenir totalement insupportable et odieux. Mais cest le bon qui reste.
Jai de grands souvenirs de ces films quil memmenait voir (il avait une
carte de critique qui lui donnait droit à 2 entrées gratuites) et ou nous devions
improviser totalement les dialogues et la bande son, lui gueulant à un bout de la salle
et moi à lautre, arrivant à exaspérerles
spectateurs, à les faire rire, à ne pas se faire virer ou casser la gueule et parfois à
déclencher de vives bagarres entre nos détracteurs et nos partisans.
Hypergraphie
1973 Antoine Grimaud
En
novembre a lieu l'une des soirées de
Clermont-Ferrand, dans le Café Théatre Issoirien,
le vendredi 16. Il y a eu, avec ma participation, au moins trois soirées à
Clermont-Ferrant, au fil des années. Est-ce ce jour là que nous étions descendus de
Paris avec Florence Villers, François Letaillieur et Gérard-Philippe
Broutin dans ma 2CV pour animer une soirée poétique ? Comme toujours nous disions
les poèmes des uns et des autres et présentions un grand nombre d'uvres et
théories. A une de ces soirées, après que Broutin soit remonté sur Paris,
j'avais avec Letaillieur récité quelques poèmes de Spacagna,
qui n'était plus membre du groupe mais toujours l'un de mes poètes préférés, et, nous
avions passé des enregistrements de Dufrêne, Brau et Wolman.
Palette
1973 Antoine Grimaud
En
décembre, le 11, j'organise au centre Centre
américain une soirée poétique dans laquelle nous récitons des poèmes, de Baudelaire
à nous-mêmes pour illustrer l'histoire de la poésie, exposée en conférence. Sylvie Fauconnier et Sandra Scarnati
organisent le même soir une soirée de danse.
Dans ma
caisse, je trouve aussi des traces d'évènements ou d'expositions (?), mais rien de plus
...
Peut-être un jour ...
Et des tracts aussi, dont je donne quelques mots.
Groupe
Lettriste
Association internationale des arts - galerie de Marseille -
Exposition, préface de Michel Hoog
Ai-je participé ?
Pariser Lettristen
im « studio M »
[photocopie de 2 articles parus le 27/9/1973 dans le
Frankischer Tag.]
Première intervenion de Mike Rose ?
Loi économique des lettristes du 1er mars 1973 :
texte dIsou sur les rapports économiques entre camarades « les
premiers échangistes des biens réalisés par nous . » Ai-je lu cela à
lépoque sans aucun doute, et je lai même mis de côté puisque je
retrouve ce texte [ronéoté, 1 page, 21 x 27], mais je ne pense pas que jy prenais
grand intérêt. Isou avait (aussi) une tendance au juridisme, un peu obsédé textuel
parfois. Cela me rappelle un autre souvenir, de la même pèriode sans doute.
Jaurais beaucoup aimé avoir une uvre dun camarade un peu plus âgé que
moi et je lui avais proposé un échange ou un achat dun de ses dessins. Il choisit
lachat et mindiqua un prix, que je ne contestais pas, mais qui me demandait
réflexion. En me promenant dans le quartier, je trouvais dans une galerie, un dessin de
cette série, beaucoup moins cher que ce qui métait demandé. Je métonnais
donc auprès de lui, vu la commission de la galerie, combien lui vendait-il, et nous
étions amis . Et jeus cette très jolie réponse : « tu comprends
Grimaud, les galeries ils sont très durs en affaire, alors si on ne peut pas gagner sur
les amis ». Nous ne fîmes pas affaire.
Contre Jean Clair-Goebbels, tract sur papier
mauve, tiré en Février 1973, dont le titre indique le contenu, et qui était (ou devait
être ?) développé dans la Seule Vérité Plastique, revue fondée
par Gérard-Philippe Broutin. Nous nétions pas amis avec Jean Clair,
et il ne devait as aimer être traité de nazi « Tant que je serai à
Beaubourg, vous ny entrerez jamai » dit-il un jour. Peut-on lui donner
tort ?
Le
11 mars 1973, un tract de 5 pages, « explication
de laffaire Arkitu » qui doit être la suite et fin de
lintervention au Ranelagh en 1972
« Knakapata !
Knakapata !»
« Défense
des capacités et des qualités dHenri Langlois » enfin un tract
positif dans le début de son titre mais qui se poursuit par « et critique
de ses défauts et insuffisances ». Distribué le 24 février 1973 à
lassemblée générale de la Cinémathèque. A la cinémathèque, mais sans doute
avant 1968, il fallait quelques francs pour payer sa place plus un ou deux centimes pour
payer son ticket. On y voyait tous les films du monde et de lhistoire du cinéma,
courant après la dernière séance pour sauter dans le dernier métro ou rentrant souvent
à pied dans de longues déambulations dans la nuit parisienne. Je me souviens
davoir vu un très grand nombre de fois « Les
fraises sauvages », dans des langues variées et des sous-titres
improbables. Cest comme si Langlois, chaque fois qu'il navait pas le
film annoncé, passait une nouvelle copie de ce film là.
[décidément Goebbels nous inspirait, voici un communiqué de Maurice
Lemaître du 20 janvier 1973 qui à propos de Maurice Genevoix et du Haut
comité de la langue française .. ]
Soirée du 14 octobre 1973
à la cinémathèque
autour du
"Film est déjà commencé?"
de Maurice Lemaître
Le petit verre
1973 Antoine Grimaud
Le mouvement Lettriste [...]
au service de la Jeune peinture
(3 pages)
Le petit verre
1973 Antoine Grimaud
Le petit verre
1973 Antoine Grimaud
Nous appelons les étudiants
....
signé, entre autres, par
l'Association pour la pensée-mao-tsétoung
Le petit verre
1973 Antoine Grimaud
Georges Pompidou,
Pierre Mesmer,
Valéry Giscard d'Estaing,
[...]
vendez [...]
l'or de la banque de France
ou démissionnez
Organigramme
1973 Antoine Grimaud
Le petit verre
1973 Antoine Grimaud
Le Musée d'art
Moderne crève dans la honte et avec un dernier mauvais coup